MÉDIRÉGI est une agence de facturation médicale RAMQ, fondée en 1987 (www.mediregi.com), alors nous en avons vu des réformes du système de santé. De l’introduction des GMFs dans le début des années 2000, à la création des CISSS et CIUSSS, à l’abolition des Agences Régionales et dernièrement la création de Santé Québec sous la loi 15, toutes des réformes qui ont eu un impact mitigé sur le système de santé. À travers tous ces changements, nous avions une certaine confiance que gouvernement savait où il s’en allait et avait notre bien-être à cœur. Or, avec l’adoption de la loi 2 (sous bâillon doit-on le rappeler), cette confiance est perdue et nous ne pouvons plus nous taire.
La loi 2 est aussi complexe (le Ministre Dubé tarde à clarifier plusieurs aspects lorsque les médias et les médecins lui demandent des précisions) qu’antidémocratique (une loi adoptée sous bâillon à 04h00 du matin dans la nuit de vendredi à samedi!? Quelle est cette pratique digne de l’ère Soviétique !?). En utilisant des termes tendances, comme « capitation », « performance », « pénalités », le gouvernement Caquiste tente de s’arracher une portion de l’opinion publique en essayant de se montrer sévère dans ses négociations avec les médecins (à la veille d’une élection non moins!).
Étant une agence de facturation médicale (une compagnie qui gère la paie des médecins dans le système public), nous regardons quotidiennement « sous le capot » du système de santé québécois, ce qui nous permet d’avoir des connaissances approfondies des termes tendances qu’utilise le gouvernement. Ces termes ne sont pas nouveaux, malgré que le Ministre Dubé se pette les bretelles avec sa réforme drastique, et nous tenons à vous vulgariser leurs définitions :
- “Capitation” –> Cela veut dire qu’une portion de la rémunération des médecins de famille sera liée au nombre de patients qu’ils auront inscrits. Plus le nombre de patients inscrits est élevé (modulé aussi selon la complexité des patients inscrits), plus la rémunération sera importante. Ceci n’a rien de nouveau ! Les médecins de famille ont déjà une portion non-négligeable de leurs revenus qui sont liées à ce critère précis!
- “Performance” Les docteurs, qu’ils soient payés à l’acte, à l’heure, ou dans un mode mixte, sont déjà payés pour leur performance. Plus qu’ils font d’heures, ou d’actes, plus ils sont payés! Encore une fois, rien de nouveau !
- “Pénalités”–> Il existe déjà plusieurs restrictions administratives qui encadrent le travail des médecins. Ces derniers doivent avoir un PREM (un permis pour travailler dans une région géographique précise), doivent se conformer aux AMPs (activités médicales particulières qui sont moins attrayantes et octroyées selon la nécessité locale par leur DTMG), doivent subir des plafonds de revenus et d’activités (des limites sur le montant d’argent et / ou le nombre de certains actes médicaux selon une période donnée au-delà desquels ils ne sont pas payés), etc. Si les médecins ne respectent pas ces contraintes, ils sont assujettis à des pénalités sévères pouvant allant jusqu’à 30% de leurs revenus bruts. Et donc, imposer des pénalités administratives n’a rien de nouveau!
Maintenant qu’on s’entend que ces termes tendances n’ont rien de nouveau, il semble que les seules choses “drastiques” de cette réforme sont la façon dont la loi a été adoptée (sous bâillon, à 04h00 du matin la nuit de vendredi à samedi) et le niveau de dommage potentiel que subira notre système de santé si la loi reste inchangée (avec la perte de centaines de médecins vers l’Ontario et ailleurs). Pourquoi l’adopter sous bâillon si elle est vraiment bien fondée et logique? Pourquoi ne pas laisser le temps aux processus habituels, qu’est-ce qui presse (à part la date de la prochaine élection)?
Nous avons vu plusieurs exemples de comment le Ministre Dubé va couper certains coûts avec la loi 2 – ce qui est évidemment une bonne chose – mais, comment ces coupures vont-elles améliorer le système de santé vraiment? Comment, concrètement, la loi 2 est-elle bénéfique pour les Québécois? Quel article de cette loi permettra un temps d’attente moins long aux Urgences? Ou de réduire la liste d’attente pour une chirurgie? Ou d’obtenir un médecin de famille pour chaque québécois?
Nous sommes tous d’accord que le système de santé a besoin d’aide – mais nous avons besoin de solutions concrètes, réalistes, et précises qui sont basées sur une collaboration entre les experts des deux côtés de la table de négociations, et non pas une décision exécutive, unilatérale et forcément politique, qui résulte de la vision étroite d’un parti politique qui vise avant tout la réélection.
Si le gouvernement Legault ne veut pas être connu comme celui qui a détruit notre système de santé, en autre, en causant un exode massif de médecins vers l’étranger, il doit suspendre l’application de la loi 2 et retourner négocier de bonne foi avec la FMOQ/FMSQ
Sinon, et je ne veux pas avoir un ton trop alarmiste, mais, avec les médecins actuels qui quittent le Québec, et avec l’attrait de ce métier qui vient de chuter pour les prochaines générations, j’ai bien peur que ça pourrait devenir le début de la fin de notre système de santé public.
Patrick Busch, Président MEDIREGI BILLING SERVICES INC.
